Louis Bouvier

(1856-1944)

Louis Bouvier en 1908 (Album Mariani)

Naturaliste français (Saint-Laurent-en-Grandvaux,1856, mort à Maisons-Laffitte, 1944). Membre de l’Institut de France, il était Professeur honoraire du Muséum National d’Histoire naturelle.

Titulaire de la chaire d’entomologie, il s’est spécialisé dans l’étude comportementale des insectes : Vie psychique des insectes (1919), Habitudes et métamorphoses des insectes (1921), le Communisme chez les insectes (1926).

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L’auteur de l’Histoire du Grandvaux, l’abbé Luc Maillet-Guy parle de lui en ces termes. Nous sommes au début des années 1930.
«Il fut toujours un infatigable travailleur, servi par une belle intelligence. En 1872. il est à l’École normale primaire de Lons-le-Saunier. Nous le trouvons en 1875 instituteur-adjoint à Clairvaux, et en 1878 maître-adjoint à l’École normale de Versailles. En 1881 il est professeur à l’École normale de Villefranche (Rhône).

Boursier du Muséum d’histoire naturelle en 1882 il devenait licencié es sciences naturelles en 1883. Licencié es sciences physiques en 1884, agrégé en 1885 et docteur es sciences naturelles en 1887 Fin 1889 nous le trouvons professeur à l’ École  supérieure de pharmacie et en 1895 professeur au Muséum. Il est depuis peu professeur honoraire de ce grand Établissement.

Le 7 juillet 1902 il est élu membre de l’Académie des Sciences dans la section d’anatomie et de zoologie. Le siège qu’il occupe le fut tout d’abord par l’illustre Georges Cuvier Comtois, qui fit partie de la première fournée et fut académicien pendant trente-sept ans.

M Bouvier fut promu Commandeur de la légion d’honneur en 1923 à l’occasion du centenaire de Pasteur. Fidèle à l’honneur comme cet éminent jurassien, M. Bouvier reste aussi fidèle au Dieu de sa jeunesse.»

Voici un article paru dans le Lien, revue semestrielle des Amis du Grandvaux. Ce texte est de Monsieur Verchère, ancien directeur du Cour Complémentaire (actuel collège de Saint-Laurent), qui retraça la vie de Louis Bouvier le 14 juillet 1947, à l’occasion de l’inauguration de la plaque qui porte son nom.

 “En 1856, le 9 avril : Louis Eugène Bouvier est né à Saint Laurent (La Savine). Il est le fils de Pierre Célestin Bouvier, horloger et de Victorine Guy.
De 1862 à 1872 : Louis Bouvier a fréquente l’école communale de Saint Laurent dirigée par Monsieur Crinquand. Il se classe premier dans un concours qui existait dans les écoles communales du département, premier  du canton, premier à l’arrondissement, premier au département.
Tout enfant, Louis Bouvier avait commencé à aimer l’histoire naturelle, sous l’influence de maîtres d’école intelligents, vers qui sa pensée reconnaissante se plaisait à remonter, quand une découverte intéressante venait embellir ses travaux.
Élevé au milieu des rumeurs de la ferme paternelle, près de La Savine, dans un cadre de la beauté sévère de notre Grandvaux, il savourait intensément la grandeur et la présence toute proche de la forêt. Ses promenades le portaient tout naturellement à s’occuper de la vie silencieuse des bois. A terre, parmi les brindilles, les pives, les “ronds de sorcière” passaient et repassaient sans cesse les actives et industrieuses fourmis bûcheronnes.
Les fourmilières, pleines de petites bêtes affairées, intriguaient l’enfant que déjà appelait le monde fabuleux des insectes. “Louis savant”, comme on l’appelait, ne manquait jamais d’apporter à ses maîtres les insectes nouveaux qu’il découvrait au cours de ses promenades solitaires, dans les forêts de La Savine ou du Mont Noir.
De 1872 à 1875
: Louis Bouvier continua ensuite ses études à l’École normale de Lons-le-Saunier. Il obtint le brevet obligatoire et le brevet complet avec mention de l’allemand.
En 1875
: par arrêté du préfet, il fut nommé instituteur adjoint à Clairvaux.
En 1877
: il fut nommé instituteur adjoint à Lons le Saunier. D’un rapport d’inspection, nous extrayons la conclusion suivante : “Monsieur Bouvier est un jeune maître que le zèle dévore et l’ardeur consume. Monsieur Bouvier va, va, emporté par son désir de faire beaucoup sans songer qu’il se fatigue inutilement. Il deviendra un de nos meilleurs maîtres. Qu’il persévère à suivre la voie qu’il a prise.”
En 1878
: Louis Bouvier est maître adjoint à l’E.N. de Versailles, puis à Villefranche sur Saône.
En 1881
: il entre à l’École normale supérieure de Saint Cloud, puis il est nommé professeur titulaire et reprend ses fonctions à Villefranche.
En 1882
: il alla, conseillé par le grand naturaliste Edmond Perrier, à Paris, comme boursier du Muséum d’histoire naturelle. Depuis lors, toute sa brillante carrière se déroule au Muséum.
En 1883
: il est licencié ès sciences naturelles ;
En 1884
: licencié ès sciences physiques ;
En 1885
: agrégé ès sciences naturelles ;
En 1887
: docteur ès sciences naturelles après avoir fait une thèse sur les mollusques. La même année, il est chef des travaux, puis sous-directeur des hautes études dans le laboratoire de zoologie du Muséum.

En 1889 : il fut nommé professeur agrégé à l’École supérieure de pharmacie de Paris.
En 1895
: il est professeur d’entomologie au Muséum d’histoire naturelle. L’entomologie comprend, non seulement l’étude des insectes, mais encore celle des crustacés, des arachnides, des myriapodes. Aujourd’hui les applications de l’entomologie à l’agriculture et à la science ont pris une importance considérable. L’entomologie est représentée officiellement par une chaire au Muséum d’histoire naturelle, le laboratoire et les collections qui en dépendent, et par l’ensemble des stations entomologiques qui se consacrent à l’étude des ennemis des plantes. C’est donc cette chaire importante des animaux articulés qu’obtient Louis Bouvier.
Le 7 juillet 1902
: il est élu membre de l’académie des sciences dans la section d’anatomie et de zoologie, siège occupé autrefois par l’illustre Georges Cuvier, Comtois aussi.
En 1922
: à l’occasion du centenaire de la naissance de Pasteur, il est nommé Commandeur de la Légion d’honneur.
En 1925
: il est élu président de l’académie des sciences.
En novembre 1942
: l’académie des sciences lui décerne sa plus haute récompense : le prix Albert 1er de Monaco, d’une valeur de 100 000 francs.

Louis Bouvier était membre de l’Institut, membre de la Société nationale d’Agriculture de France, professeur honoraire du Muséum national d’histoire naturelle, doyen d’élection de l’Académie des sciences.
Les travaux de Louis Bouvier sont nombreux. Le premier, en effet, il démontre que les fourmis sont presque aveugles et ne conçoivent le monde extérieur qu’à la suite d’une perception des odeurs remplaçant la vision colorée. Louis Bouvier appela cela “le panorama olfactif des fourmis”. Ce sens topo-chimique, admis plus tard par d’autres savants, fait, dit Louis Bouvier, “connaître aux fourmis les formes et les relations des formes”.
Ces insectes sont capables de distinguer grâce aux champs odorants de leurs antennes, les différences que présentent les traces d’aller et de retour, sur une piste, le côté droit et le côté gauche de celle-ci, et, par conséquent, la direction qu’elles doivent prendre.
Les travaux de Louis Bouvier étudieront les mœurs de la diglossa submarina, insecte qui se tient enfoui dans les sables recouverts à marée haute. De l’étude de la diglossa et de certains coléoptères des îles de la  Sonde et de Cayenne ayant des mœurs aquatiques, Louis Bouvier est conduit à l’étude des crustacés et des mollusques.
Il participe notamment en 1905 à une campagne scientifique du Prince de Monaco. Cette expédition à travers la mer des Sargasses était munie d’engins les plus modernes permettant d’étudier sur une vaste échelle, la faune des grandes profondeurs de la mer.
Le célèbre naturaliste nous décrit la fourmi jardinière qui sème des fleurs dans les méandres de son obscure cité et témoigne ainsi d’un idéal de beauté et d’un goût réel pour la fleur, signe d’une intelligence supérieure qui étonne et confond.
Les ouvrages que Monsieur Louis Bouvier a écrits sont très nombreux. En collaboration avec Monsieur Boule, professeur au Muséum d’histoire naturelle et Monsieur Lecomte, professeur aux lycées Henri IV et Saint-Louis, il rédige en 1905 un cours élémentaire d’histoire naturelle à l’usage des élèves de premier et second cycles. Dans ce cours, il compose entièrement les “notions de zoologie” et les “éléments d’anatomie et de physiologie animales”.
Louis Bouvier aimait plutôt exposer dans des travaux spéciaux, les résultats de ses laborieuses et patientes recherches. Nous lui devons notamment les ouvrages intitulés :
  • La vie publique des insectes (1919),
  • Les habitudes et les métamorphoses des insectes (1921),
  • Le communisme chez les insectes (1926).
Ce grand savant s’est éteint à Paris, le 17 janvier 1944 à l’âge de 88 ans. Il laisse parmi nous le souvenir d’un esprit remarquable et d’une intelligence scientifique et littéraire de la plus haute envergure. Les travaux de Louis Bouvier l’éloignaient souvent de Saint Laurent, mais l’amour de son village natal vibrait toujours en lui. Il aimait chaque année revenir serrer la main des Grandvalliers. Il a préfacé “l’Histoire du Grandvaux” de l’abbé Luc Maillet-Guy.
Là, Louis Bouvier nous parle de la ténacité grandvallière, des activités essentielles de Saint Laurent pendant le second empire : l’horlogerie, le roulage, l’industrie fromagère.
Il fait l’éloge de l’école et des sociétés locales en ces termes :
Les écoles contribuaient au développement de l’activité locale. A Saint Laurent, elles étaient renommées et attiraient au bourg, de bien loin parfois, quantité de pensionnaires internes qui étaient autant de recrues quasi- permanentes. L’école communale dirigée alors par Célestin Crinquand était importante. Elle a répandu son influence bien en dehors du Grandvaux et groupait souvent plus de 20 pensionnaires. On doit rendre au bon maître Crinquand qui se dévoua sans mesure, un hommage de gratitude et de vénération“.
Aux jours de fête, le bourg laissait transparaître la satisfaction que lui donnaient ses sources de prospérité multiples. Quel entrain, quelle animation pour la Saint Laurent, pour la fête de l’Empereur qui coïncidait avec l’Assomption, pour la Fête-Dieu.
La veille au soir, c’est la retraite de pied ferme devant l’Hôtel de l’Empereur de France, puis la retraite en marche, par clairons et tambours des pompiers. Le matin, c’est le rappel exécuté par les mêmes à diverses reprises, puis le rassemblement devant la mairie des pompiers auxquels se sont joints, en uniformes, gardes forestiers et douaniers.
Puis, Louis Bouvier, dans cette préface, fait l’éloge du patois : “Le Grandvallier tenait à son patois et savait railler le jeune qui, après un séjour à la ville, feignait d’avoir perdu le patois local. Un béjaune de cette sorte fait ses grâces dans un champ, auprès des faneurs qui se hâtent et, taquinant du pied les dents d’un râteau, en reçoit le manche sur la figure “Tsancrou détréte” (sacrédié de râteau) s’exclame-t-il, aux rires de ses compatriotes qui l’entourent“.
L’histoire est belle ; on la racontait partout dans le Grandvaux.
Louis Bouvier conclut : “Le patois Grandvallier disparaîtra peut- être sans laisser d’œuvre écrite sérieuse. Mais ce qui ne peut disparaître, c’est l’esprit foncier du Grandvaux, la ténacité grandvallière et sa puissance d’adaptation aux nécessités des époques“. (La revue Le Lien présente régulièrement des articles sur le patois)
Merveilleusement situés à une grande croisée de routes, en un canton où lacs et sites sont aussi nombreux qu’admirables, Saint Laurent et le Grandvaux reprennent sous une autre forme l’activité qu’ils avaient jadis, et, si on les juge d’après ce qu’ils furent, on peut avoir confiance dans leur avenir.
Fils de la glèbe, Louis Bouvier a démontré, et avec quel éclat, que les familles paysannes font, parfois, souche de savants. Saint Laurent peut être fier d’avoir donné à la France et à l’humanité, un si grand naturaliste. Sorti de notre école primaire, Louis Bouvier s’est élevé seul, par son travail, jusqu’aux plus hauts sommets de l’Institut.En lisant son nom à l’entrée de l’école, vous, mes chers enfants, et les générations futures, vous vous souviendrez qu’un enfant de la commune peut devenir un savant de réputation mondiale
Vous vous souviendrez qu’en vous dévouant, plus tard à l’intérêt général, vous rendrez d’immenses services à l’humanité.
Tous ensemble, nous devons nous montrer dignes du nom que porte désormais l’école de garçons. Je remercie la municipalité de l’aide financière qu’elle nous apporte. Je compte sur elle pour rendre l’école encore plus grande, plus importante et plus belle.
Vous, mes enfants, continuez vos efforts.
Encouragés par les résultats obtenus par vos aînés, tant au certificat d’études, qu’au concours d’entrée à l’ENP de Morez, au brevet élémentaire et à l’école normale, vous devez arriver aussi au succès.
Souvenez-vous continuellement que le nom de cette école est : ÉCOLE LOUIS BOUVIER. Et que sa devise est le mot que ce savant répétait toujours : Travail”

Louis Bouvier sur Wikipedia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Louis_Eugène_Bouvier